Previously on the Crappy Life Of Avery Cunningham...

20 Novembre 1989, Denver, je nais. 20 Novembre, journée de la célébration internationale des droits des enfants. Ça tombe à pique, non ? Tellement à pic dans l'agenda de mère, qui après avoir su qu'elle était enceinte a décidé de tout planifier afin, que moi – la surprise – je ne l'y reprenne plus jamais. Non, prévoir tout de A à Z, pas d'arrivée soudaine en plein diner d'affaire, pas non plus lors d'un vol pour je ne sais quelle destination. 20 Novembre, 08h00 du matin, à Denver, parce qu'il y a un trou dans l'agenda de Margaret. Pas besoin du père, il assiste à un meeting hyper important, juste un mail pour lui dire que tout c'est bien passé. L'infirmière de la clinique privée, elle a dû se sentir plus ''mère '' que ma propre mère elle-même n'a jamais dû se sentir. Deux jours à la clinique, pas plus, parce que Margaret doit rejoindre Peter à Chicago. 22 Novembre, rencontre avec Alyson – ma mère de substitution. Dans la logique des choses, et paradoxalement à ma date de naissance, je n'ai pas eu la totalité – ni le dixième même – des droits que peu valoriser un enfant. La présence de mes parents ? Deux semaines de chaque mois (l'un des deux, jamais ensemble, pas de temps pour ça ou sinon c'est assez rare). Je parle de leur présence physique et non de l'attention morale qu'ils daignaient me porter. « Oh seigneur ! Elle ne va donc jamais se taire ? » Suivie tout de suite après de « Faites-là taire immédiatement, j’ai un terrible mal de crâne. » Aussitôt mon Alyson venait me chercher pour m’emmener dans une autre pièce. Plus haut, oui c’était bien mes parents. Margaret en premier, soit ma mère, avocate au bras de fer redoutée et admirée par les pauvres ménagères qui rêvent chaque jours, de s'accomplir, de réussir, d'être utile et importante. Femme qui s'avère être une sacrée vipère de l’extrême qui quoi qu’il arrive s’en remettra toujours à dieu, bien qu'elle ne soit pas si croyante que ça. Désolée Mère, mais là, c'est la vérité que je compte cracher, ce n'est pas contre toi mais plutôt contre ce que tu es. En deuxième donc, Peter Cunningham, républicain dans l'âme, vivant son premier mandat en temps que Maire de Denver ( il en a un rempli un deuxième, et est actuellement en pleine campagne pour devenir Sénateur du Colorado ) surnommé par les média en tant que ''L'Homme à la chambre universelle'' parce que, tout le monde y passe il paraît, pour moi, c'est l’Étouffeur : étouffer n'importe quelle affaire compromettante, étouffer tout ce qui le dérange, moi y compris. J'ai donc grandi dans le joyeux bordel qu'est la politique américaine. Sans critiquer bien entendu. Quand mes parents ne m’abandonnaient pas à la maison, j’avais le droit d’accompagner ma mère faire les boutiques avec ses riches amies, et leur riches et pimbêches de filles. Oui pour moi à l’époque c’était un privilège, non pas de faire du shopping, mais bel et bien de l’accompagner. Petite, je croyais que ma mère était payée pour acheter des trucs dans les beaux et grands magasins. Comme à chaque fois que je demandais quelque chose elle me le prenait, je rêvais plus tard de faire le même métier, trop jeune encore pour comprendre à quel point c'était excessif, à quel point c'était superficiel, à quel point c'était vomitif de ne penser qu'à soit de la sorte. Je n’ai jamais manqué de rien, tant que c’était matériel. J’ai toujours été habitué a avoir le meilleur du meilleur la qualité jouant sur les apparences j’eus le droit à tant de choses qu'à côté, le poids de mon existence faisait plume.... même pas. Enfin je m’étale dessus mais c’est parfaitement normal après tout. Comme tous les enfants de riches qui n'acceptent pas bêtement et égoïstement leur statut justement de riche je me suis créée une nouvelle famille j’ai nommé la nourrice, le chauffeur, le cuisinier, eux parfois ils m’écoutaient. J’ai toujours remercié intérieurement mes parents de ne pas en avoir viré un seul depuis ma naissance, au moins une bonne action qu’ils aient faite. J'ai été balloté, tel un flotteur de canne à pêche sur la surface de l'eau, partout dans le monde. J'ai fait tout un tas de pensionnats : Amérique, Canada, Angleterre, France et Allemagne. Chaque fois le suivant un peu plus loin du précédent ce qui à la fin faisait toujours très très loin de Denver. Mes parents, je ne les ai pas vu vieillir, tout comme eux ne m'ont pas vu grandir. Une année, je fêtais mes dix ans, l'autre mes quinze et enfin mes dix-huit ans. Ce qui a changé ? Absolument rien. Mes rapports avec mes parents n'avaient pas vraiment évolués, ils étaient toujours aussi absents, j'étais toujours leur petit fardeau, et il semblait que j'allais le rester pour toujours.

And there's a time, you supposed to make your own decisions...

« Tes lettres d'admissions des universités sont arrivés » Je me laissai tomber sur la chaise dans l'immense salle à manger. Très tôt le matin, il me faut du temps pour réaliser la chose. Comme bien souvent, Peter tient un journal au revers de républicains, Margaret ajoute deux sucres dans son thé de Chine. Attendez quoi ? « Mes lettres ? » Je les regarde tour à tour plus que consternée, abasourdie, ne comprenant pas ce qu'il se tramait, ce qu'ils avait encore magouillé pour me ruiner une fois de plus. Margaret arbore une mine de ces bon jours, le regard un peu moins dur, les traits un peu moins tirés, elle a presque un peu l'air.. d'une mère ? « Mais c'est impossible, je n'ai postulé que dans une seule, celle de Denver. » Peter pli sèchement le journal, mauvaise nouvelle sûrement, son principal et direct concurrent, Aaron McAllister le démocrate, qui lui vole des voix au sondage ? Il boit une gorgée de son café et me regarde. Je voudrais baisser ou détourner le regard, mais mon caractère ne me permet pas de fuir la confrontation, son regard se durcit et me met mal à l'aise. Je sens un mal de tête arrivé comme si c'était lui qui me l'envoyait directement, en réalité, je sens juste que ce qui arrive ne va pas me plaire. Pas du tout. « Elle y est aussi, mais il va de soit que tu n'iras pas. » J'accuse le coup, le temps de trouver quoi répondre. Mais ça ne vient pas, je tombe de bien haut alors que depuis des années j'ai appris à ne jamais monter trop haut. Je le regarde toujours, mais ça ne vient pas. Pourquoi fallait-il qu'à chaque fois, que je n'avais pas besoin d'eux ils rappliquaient immédiatement, autant par surprise que par leur capacité à être indésirables. « Dieu merci, on s'y est pris à temps. On a dû jouer de nos plus hautes connaissances. Jayleen pourquoi tiens-tu à toujours nous compliquer la vie ? Tu ne crois pas en avoir déjà fait assez ? » Ma langue se débride enfin, comme à chaque fois que commence les reproches. Ces derniers qui ont toujours eut une place importante chez les Cunningham, peut-être même plus importante que la mienne. « Je ne vous ai absolument rien demandé à l'origine. » Une réponse fuse. « Tu crois vraiment que nous avons demandé quelque chose à l'origine ? » Je reste choquée. Ça y est c'était enfin sorti. J'avais toujours voulu qu'ils l'avouent, qu'ils me l'avouent. Ils n'avaient jamais voulu de moi, et s'ils avaient tout fait en sorte que je ne puisse jamais avoir une preuve venant de leur part que c'était la vérité, aujourd'hui Margaret avait enfin lâché le morceau. Je le savais, depuis longtemps en plus. Alors pourquoi ça fait mal ? Mes yeux me brûlent tellement j'essaye de contenir ces saletés de larmes – qui malgré le fait de ne pas avoir été conviées – se pressent à mes yeux. A quoi bon verser de la tristesse ? A quoi bon, toujours espérer quelque chose d'eux ? Pour à la fin être déçue. Un long silence s'installe. Après quelques minutes et un litre de larmes tombées pour rien, je me lève pour quitter la pièce. En passant la porte, le vent souffle à mon oreille en empruntant la voix de mon père. « Yale, Brown ou Darmouth, tu as le choix. » Une fois dans ma chambre, je n'eus pas d'autre alternative que de laisser libre cours à mon mal -être, à coup de larmes, de cris rageurs étouffés, d'hoquetements pénibles, violents et incessants. Jusqu'à ce que des bras plus que familier m'enveloppent. Alyson. Au lieu de me réconforter, la chose m'accabla. Ce n'était pas supposé être elle, c'était le rôle d'une mère normalement, écouter la tristesse, absorber la colère, inviter la joie, créer l'amour. « Tu ne peux pas toujours refuser ce qui s'offre à toi mon ange… » « Si je vais dans une de ces universités, ce serait leur donner raison. Je refuse. » Sa main passe dans ma chevelure tout en traçant des raies imaginaires, comme si elles séparaient distinctement quelque chose. Une mèche du côté droit : ce sont les meilleures universités au monde. Une nouvelle vers la gauche : je vais me retrouver avec tous ces enfants de snobs – qui le sont eux-même d'ailleurs. Une devant : les trois sont assez loin de Denver... Une dernière pour l'arrière : je ne serais pas obligé de rentrer chaque jours, chaque semaines, chaque mois. J'inspire lourdement, tandis que mes sanglots se sont espacés et commencent à s'évanouir. Il est l'heure de rendre les armes, et même si la bataille n'a pas été franche, et plutôt de courte durée, je suis complètement vannée. « Tu as raison Aly. »

Well you came then you broke-and-entered right into my heart.

Une semaine après mes valises étaient bouclées. Je me suis laissée emporter, après tout c'était perdu d'avance, enfin c'est ce que je parvenais à me répéter inlassablement pour ne pas me faire croire que j'avais juste accepté bêtement et lâchement. Mon choix s'était aléatoirement porté pour Darmouth. Tout était déjà prévu en fait, mon billet d'avion, le transport jusqu'à l'université, l'accueil de la sororité, le logement dans la dite sororité. Sororité, exclusivement féminine donc, l'une des plus vieille de l'université pour les ''enfants de bonnes familles'' Le soir-même de mon arrivée au campus, soirée de présentation à la fraternité égal à la mienne réservée elle pour le sexe masculin. Vous savez, il y a des gens formidables qu'on rencontrent au mauvais moment. Et il y en d'autres qui sont formidables parce qu'on les rencontre au bon moment. Je ne sais pas dans quelle catégorie rentre Hayden, mais une chose est sûre, c'est qu'il est la personne la plus formidable que je n'ai jamais rencontré. « Bienvenue à Darmouth. » Grand, brun, souriant, le jeune homme me tend un verre rempli de whisky. J'accepte le verre et le remercie d'un mouvement de tête déjà prête à fuir, les gens qui vous offrent un verre et qui ont l'air sûr d'eux mais gentil, ça n'apporte jamais rien de bon. « Je le savais ! » Je me retourne curieuse. Que savait-il au juste ? Que je n'étais pas intéressée ? Que j'étais du genre à fuir toute source de problèmes ? Quoi au juste ? « Pardon ? » « Le verre. Je savais que tu étais du genre whisky. Tu en avais l'air. » Je me rappelai rapidement quelle était ma position il y a quelques instants, adossée sur la grande bibliothèque d'ébène, regardant très concentrée le pathétisme qui s'offrait à moi. Aly m'avait bien dit que je ne pouvais refuser ce qui s'offrait naturellement à moi... Mon attention se reporta sur le jeune homme, que cherchait-il au juste ? Je le scrutai un bon moment avant de sourire. « Le whisky... Elle a déjà fonctionné cette technique de drague avant moi ? » Il sourit à son tour. Je pense à partir tout de suite, mais je ne sais pas pourquoi je ne bouge pas. Le jeune homme m'intrigue. « A toi de me le dire, mais... » Il s'arrête en pleine phrase, me toise puis m'invite à boire une gorgée de mon verre. Je m'exécute sans trop m'en rendre compte, et attend la suite de sa phrase. « Je ne te drague pas là. » Je manque de recracher la boisson forte dans mon verre, en plus de passer pour une quiche voilà que je me donnais en spectacle. Je n'étais pas du genre vaniteuse, mais j'avais sérieusement pensé qu'il voulait me mettre le grappin dessus. Tentant de retrouver une certaine contenance, je haussai les épaules. « Autant pour moi dans ce cas. Je vais y aller maintenant... » Je finis d'une traite mon verre, avant de le rendre au mystérieux jeune homme. Non que je le prenne pour mon larbin, mais à la base je ne lui avais rien demandé, donc s'il s'était montrer aussi serviable, il pouvait bien continuer à l'être un moment encore. Je passai une main dans mes cheveux réfléchissant à comment clore cette conversation. Comme habituellement, rien de bien perspicace ne me vint en tête. Parfois, j'aimerais vraiment tenir de Margaret ou de Peter encore, eux, ils avaient toujours leur mot à dire. « Merci pour le verre. » Je commence à avancer à reculons, lui lançant un dernier regard, je le vois qui souris encore. « Au fait, je suis Hayden ! » Comme si ça pouvait bien m'intéresser, après ce qui venait de se passer, la prochaine fois si je le croisais j'allais probablement et de manière subite décupler la faculté de me fondre dans un mur tellement l'humiliation avait été vive. « Jayleen. » Je marmonnai, en me retournant pour quitter la fête. Enfin si on pouvait appeler la dite soirée de la sorte. Les semaines qui suivirent suffirent à me convaincre que la totalité des étudiants de Darmouth étaient – ci ce n'était pas plus – au moins aussi arrogant que le fameux Hayden. Mes prières furent exaucer puisque je ne le revis pas pas du trimestre. Mais au trimestre suivant cela ne rata pas. Nouvelle soirée, même endroit, même place sur la bibliothèque, même affreux gens autour de moi et toujours lui. « Et voilà pour toi ! » Toujours aussi grand, aussi brun, aussi souriant. Bref toujours aussi beau. « Non merci.» « Allez Jay' fais pas la tête ! Je plaisantais la dernière fois tu sais. Et c'est du champagne, pas du whisky. » Je ne savais pas ce qui me dérangeais le plus et même par où commencer. Qu'il soit là premièrement, toujours aussi agaçant avec son sourire de bienfaiteur. Qu'il se soit joué de moi, et devine à présent que j'ai été terriblement vexée la dernière fois. Ou encore, qu'il fasse comme s'il me connaissait depuis des lustres, à m'appeler Jay, et savoir qu'à cette période de l'année (décembre), je préférais le champagne au whisky. Bornée, je hochai la tête négativement, il pouvait aller au diable avec son verre. Soutenant quelques instants son regard, je souris à mon tour et lui tournai le dos pour me diriger vers la sortie. Au passage, je ne manquai pas d'attraper une coupe de champagne, puisque au fond j'en avais bien besoin d'une. Même dehors, dans le parc, mon sourire restait figé sur mes lèvres, comme si en réalité, la situation m'amusait. Je me repassai la scène en tête la trouvant successivement, stupide, marrante, étrange et enfin troublante. « Tu fais souvent ce genre de chose ? » Je sursautai tellement fort, que ma coupe s'écrasa violemment au sol ne manquant bien évidement pas de répandre son contenu sur l'une de mes jambes. Je ne pris même pas la peine de répondre tant l'accident me mettait en rogne. Je lui arrachai des mains le mouchoir en tissu qu'il me tendait et me décalai automatiquement lorsqu'il s'assit près de moi. Un long silence s'installa tandis que que j'essuyais tant bien que mal le liquide de ma cheville. Je me retournai alors pour le découvrir en plein fou-rire à la limite de la défaillance cardiaque. Sans réfléchir, je lui arrachai sa coupe pour la lui envoyer en pleine figure, chose qui le stoppa net dans son rire. Une bonne chose de faite, n'est-ce pas ? Je laissai la coupe tomber par terre, et la regardai se fracasser avec force sur le gravier comme au même moment ma méfiance habituelle se brisait face à Hayden.

Nobody told me we couldn't love. Nobody told me this wouldn't last.

Nous nous sommes revus plusieurs fois, et ça n'a pas tarder, nous sommes finalement sortis ensemble. Hayden était tout ce que je n'avais jamais recherché : de bonne famille apparemment, intelligent, drôle, charmeur – un gendre parfait pour mes parents, tout ce que je m'étais toujours refuser. Les toxicos, les voleurs, les ratés, j'avais tout tenté pour énerver les Dieux (Margaret et Peter donc) et m'énervant moi-même par la même occasion. La vérité étant, que même si issue de mon habitus je voulais m'en détacher, je ne pouvais me résoudre à mettre un point sur Hayden. Et tant pis, s'il plairait à mes parents, et tant pis s'ils auront l'impression d'avoir gagner. J'étais amoureuse d'Hayden. Nous nous aimions. On s'aimait mais on ne savait pas ce que ça voulait dire, on ne savait pas que ça voulait dire qu'on allait souffrir, qu'on allait pleurer et se battre et se faire du mal et avoir envie de mourir. On avait vu les autres, mais nous n'étions pas les autres. On vivait dans l'instant, on ne se posait pas de questions, on ne savait pas qu'un jour l'amour deviendrait fous, un souvenir qui nous tord le cœur. Six mois, un an, déjà deux ans que nous sommes ensemble. C'est le bal des futurs diplômés, alors tout le monde est convié, la famille y comprit. J'avais toujours refusé à Hayden une rencontre avec mes parents, pour moi, ce n'était jamais le bon moment. Lui n'insistait pas, et ne m'embêtait pas avec une éventuelle chez les siens ce qui ne me gênait pas trop. Peut-être que si on avait été moins bête, les choses auraient été moins compliquées ? En haut des marches, j'attends que mon nom soit appelé afin de rejoindre Hayden en bas de ces dernières. Je stresse, non pas pour la cérémonie, mais à cause de la présence de Peter et Margaret dans la salle. « Avery Temperance Cunningham, et son cavalier Hayden Graham-McAllister. » Je commence à descendre les marches puis me stoppe. Avais-je mal entendu, où le doyen avait prononcé le nom de famille ''McAllister'' ? J'étais comme paralysée, le regard fou se posant tour à tour sur Hayden et mes parents, tout aussi figés que moi. Une longue moitié de minute, et je suis toujours au milieu des marches. Je suis censée faire quoi ? Le doyen me presse. « Avery Temperance Cunningham, et son cavalier Hayden Graham-McAllister. » J'ai envie de remonter vite fait bien fait, mais mes jambes ne sont pas d'accord et me pousse vers Hayden. Soit, je ne comprenais qu'à moitié la situation. Je tremblais comme un chiot de caniche qui vient juste de se faire éclabousser par une flaque d'eau, je me rattrape de peu au bras d'Hayden. Il me regarde bizarrement, je n'ose même plus le faire. Tout ce que j'étais en mesure de faire, c'était de fermer les yeux pour ne plus voir le monde, mon monde tourner à mesure que la danse avançait, , car oui, tout ceci devait se terminer par une danse. Mais c'était comme si j'étais coincée sur un manège, le manège tournait, et tournait, et ne s'arrêtait pas, comment descendre, comment stopper, comment reprendre pied, tout tournait autour de moi et ma tête tournait avec le reste. Je n'étais plus dans l'hésitation, je n'étais plus dans l'incompréhension ou le cauchemar ou même le refus. J'étais dans le vide, juste vide. Les dernières notes retentirent et aussitôt Hayden m'entrainait hors de la salle. « Ave, qu'est-ce qu'il se passe ? » Je ne répond pas, tout ce que je trouve à faire c'est m'accroupir au niveau du sol et me prendre la tête entre les mains. Voilà, quoique je fasse, il fallait que ça retombe sur moi. Il faudrait penser à tous ces destins qui échouent sur les rivages de leur possible. « Avery ? » Je m'étais contenu, mais trop, je ne pouvais pas plus. « Hayden Graham-McAllister ? Sérieusement ? Hayden McAllister ! Sérieusement McAllister ? Comme Aaron McAllister ?! » Je m'étais relevée et à chaque fois que je prononçais le nom, mon poing s'abattait sur le torse d'Hayden. « Tu es un McAllister merde ! Tu n'as pas jugé utile de m'en informer ? » Je crie malgré moi, et tant pis si les personnes qui passent à côté me prennent pour une folle, et tant pis si je me donne en spectacle. Il s'est présenté comme un simple, Hayden Graham. Il n'y avait pas de McAllister, honnêtement, franchement, tout ce qu'on voulait. McAllister je n'y avais jamais pensé, je n'aurais même pas osé. « C'est quoi le problème ? » Je ne savais pas s'il ne comprenait pas ou si au contraire il avait déjà compris, après tout, je n'utilisais pas un autre nom... moi. « Vous êtes le problème. » Voix froide, dure. Je ne songe même pas à défendre Hayden. Les parents d'Hayden font leur entrée à leur tour. « Effectivement nous avons un problème... » J'aurais voulu leur dire que non il n'y avait aucun problème, qu'Hayden et moi on s'aimait et c'était tout. On ne voulait pas leur causer des problèmes, on allait continuer à s'aimer, on allait se cacher s'il le fallait. Mais pas ce qui arrivait, comme une tornade qu'on ne peut combattre. Margeret et Peter, je le sais, vont me séparer d'Hayden. Et moi, je n'y ferais rien. La suite, je l'entend dans un brouillard, un mot sur deux, des phrases qui n'ont pas de sens et qui semblent parcourir des kilomètres avant de m'atteindre, la tête vide, le cœur qui cogne. Je suis transférée dans une autre université.

And I'll never give myself to another, the way I gave it to you.

Faut être drôlement heureux pour supporter d'être triste, drôlement heureux ou courageux. Personnellement, je n'étais ni l'un ni l'autre. Les beaux garçons arrogants mais souriant qui vous offrent un verre, ça ne vaut pas la peine, ça n'apporte jamais rien de bon. Dévastée. Je crois que c'est ce qui convient le mieux pour qualifier dans quel état j'étais. Depuis combien de temps cela durait ? Quand-est-ce que ça allait prendre fin ? Est-ce que ça allait s'aggraver ? Avais-je vraiment perdu Hayden ? Pour toujours ? Si j'avais su, moi je lui aurais dit autre chose que je t'aime, quand il m'a avoué son amour. Si j'avais su, je lui aurai plutôt balancé à la face bon : Alors comme ça tu m'aimes ? Laisse-moi juste le temps de recharger mon stock de larmes, de faire des petits packages de ma douleur, de sortir les épices pour quand je n'aurais plus goût à la vie. Laisse-moi le temps de me préparer à ça Hayden. Dis-moi, y'a pas d'assurance pour ça ? Crois-tu que je devrais m'arracher le cœur moi-même ? On sait très bien comment termine ces histoires là. Allez-va ! Faisons avance rapide même, histoire que ce soit déjà terminé, rien qu'un mauvais souvenir. Voilà, c'est pas mal ça. Mais non, moi je lui ai dit quoi à Hayden ? Un pauvre et pathétique je t'aime. Non ce n'est pas de ta faute. J'y croyais, tu y a cru. On pouvait pas savoir que l'amour ça n'était pas fait pour nous deux, que ce n'était que des mensonges de belles mais fausses histoires, pour nous piéger, pour nous faire tomber. Tous ces gens là, tous ces couples. Tout ce bonheur qu'ils transpiraient, on aurait dû se méfier Hayden. Qu'on était trop naïf mon amour. Ya des gens qui ne sont pas fait pour ça. S'aimer tout simplement. J'en ai parlé à Aly, la seule chose qu'elle a trouvé dire c'est : ''On ne devrait jamais faire l'économie d'une douleur potentielle.'' Elle a raison, mais je ne suis pas d'accord. J'ai connu Hayden et c'était formidable. Mais c'est parce que je l'ai connu que maintenant je suis brisée. Clin d'œil à ces deux coupes de champagne que j'ai moi-même cassées il y a trois ans maintenant. Deux coupes, peut-être prémonitoires ? Est-ce que ça veut dire, que tu souffres aussi Hayden ? Quoi qu'il en soit, je suis désolée. C'est vrai que je ne me suis pas assez battue, que je ne me suis pas battue tout court. Mais comment dire, Margaret et Peter, je ferais toujours mieux d'aller dans leur sens. Je l'ai toujours fait, et au final c'est un peu, un tout petit peu, grâce à eux que je t'ai connu, non ? Merde. Je continue, même dans le vide je suis bornée, et je tente de me donner raison. Aly m'appelle souvent, pour voir si la tristesse guérit qu'elle dit. Il paraît que j'ai changé depuis cette nuit du bal, plus renfermée moins communicative. J'en ai marre. J'suis diplômée, j'ai un super job, mais j'ai toujours un vide, et qu'importe les hommes qui ont défilé depuis dans ma vie, ils ne sont et ne seront jamais Hayden. Seattle, j'y connais rien mais c'est tant mieux j'ai besoin de recréer quelque chose. Tu sais, où que tu sois Hayden, je veux que tu saches à quel point je suis désolée. Et si, un jour j'en ai l'occasion, je rangerais ma fierté et te le dirait de vive voix. En attendant, je crois qu'il est temps pour moi de tourner la page.